Épisode 1 de la série de France Culture 'Héros de la nation le poids de l'héritage': 'De Winston Churchill à Boris Johnson : une certaine idée de l’indépendance britannique'

Avec Agnès Alexandre Collier (Université de Bourgogne) et Philippe Chassaigne (Bordeaux 3)

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Winston Churchill n’a pas toujours été le héros national qu’il fut entre 40 et 45. Si les hommages célèbrent l’homme de guerre, le reste de la carrière et des orientations politiques de Sir Winston semblent moins célébrées. Le mythe national est-il en train de s’effriter ? Qui s'en inspire encore ?

Le fantôme de Churchill hante la vie politique britannique, même avant qu’il soit mort en 1965. Ses phrases, ses discours, sont analysés pour tenter de donner un sens aux choix politiques contemporains. Cette tendance s’est accentuée ces dernières années, pendant la campagne pour le référendum du Brexit en 2016. En effet, les déclarations de Churchill sur l’Europe et sa possible organisation sont ambiguës, et suscitent des débats d’interprétations depuis un demi-siècle. Le Royaume-Uni comme parrain d’une possible union entre les différents Etats ? Ou en faisant pleinement partie ? 

Chacun des deux camps pouvait trouver de quoi nourrir son opinion dans la pensée du grand chef de la seconde guerre mondiale. Car, c’est en tant que sauveur du monde libre, Premier ministre entre 1940 et 1945 alors que le pays est le seul en Europe à résister à l’invasion nazie, que le pays l’honore. C’est cette figure qui reste comme référence politique, au point qu’il soit de bon ton de tenter de se dresser à son niveau : il semble que c’est ce qu’a voulu faire l’actuel Premier Ministre, en publiant en 2015 une biographie de l’homme politique, dont le titre témoigne de l’admiration qu’il lui porte : “Comment un seul homme à fait l’histoire”. Plus encore, il tente d’établir des liens : selon lui, le pays traverse une grande crise (le Brexit), et l’indépendance de l’île dépend de la solution qu’il pourra apporter.

Elu en 2002 “Plus Grand Britannique de tous les temps” par un sondage de la BBC, Churchill semblait être une figure des plus consensuelles. Si les hommages nationaux célèbrent l’homme de guerre, le reste de la carrière politique de Sir Winston semble plus méconnue et moins célébrée. Car avant et après la guerre, Churchill a occupé des postes clé : ministre de l’intérieur, de l’économie, puis de nouveau celui de Premier ministre, de 1951 à 1955. Dévaluation de la livre, répression des classes ouvrières, décolonisation… La société britannique fait régulièrement remonter à la surface des aspects plus sombres. Les graffitis “Winston Churchill était raciste” sur sa statue face à Westminster lors des manifestations Black Lives Matter de cet été marque une profonde division de la société, et la remise en question du récit national.

 

Le mythe national est-il en train de s’effriter, à force d’être utilisé pour défendre des intérêts politiques ? Comment est utilisée la figure de Churchill aujourd’hui, alors que le Royaume-Uni s’apprête à rompre les amarres avec l’Union Européenne ? Continue-t-il à inspirer réellement les politiques britanniques ?

Une discussion en compagnie d'Agnès Alexandre-Collier, professeure en civilisation britannique à l'Université de Bourgogne, et de Philippe Chassaigne, Professeur d'Histoire contemporaine à l'université Michel de Montaigne Bordeaux 3.

 

Photographie: 15 novembre 2019, BLACKPOOL, ROYAUME-UNI - Boris Johnson pose, à la confiserie 'Coronation Candy', avec une friandise indiquant son slogan de campagne ('Back Boris') • Crédits : FRANK AUGSTEIN / POOL - AFP